En mai 2017 en Ecosse, un étudiant de l’université de Gordon plaça un ananas sur un présentoir vide au milieu d’une exposition d’art contemporain. Quelques jours plus tard, il découvrit que non seulement l’ananas n’avait pas été enlevé, mais avait été mis sous verre et intégré à l’exposition.

Tous les commentaires (83)
Qui choisit de surexposer une œuvre ? Et pourquoi ?
Pourquoi un dessin d’un enfant de 4ans ne pourrait pas valoir des millions ?
Ce qui est marrant dans votre raisonnement, c’est que vous faites deux poids deux mesures.
L’art étant subjectif, ceux qui achètent les œuvres déterminent les tendances. Et par extension leurs qualités.
C’est le principe de l’art. Aucune règle, aucune logique dans la multitude de formes que peut revêtir une œuvre pour être qualifié d’artistique.
Peut-être que ça vous déçoit, mais c’est pas plus faux que de dire que l’art n’a pas de valeur.
Sauf que les gens ne sont pas "pris pour des cons" dans ce cas là... ils participent à un processus qui bien souvent dépasse l'artiste et son intention premère. Art et marché de l'Art sont deux choses bien distinctes à mon sens. Si je fréquente les exposiotions, je ne mettrai pas un pied à la fiac.
FIAC YOU!
Mouais, seulement ça ne fonctionne pas toujours aussi simplement. Pour la musique, certains artistes ne composent ni n'écrivent leurs chansons, mais sont des génies de l'interprétation. Et c'est alors l'interprétation elle-même qui est une forme d'art.
FIAC you ! Méfie toi, tu viens de faire de l'art contemporain. C'est suffisamment idiot et transgressif pour devenir le slogan de la prochaine foire.
Pour la seconde idée d'Hegel, cela concerne la relation entre l'œuvre et le modèle. Il n'existe que trois cas de figure :
- l'œuvre n'arrive pas jusqu'au niveau de détail du modèle original et ne le décrit pas complétement : c'est l'art primitif ou naïf. Une fable en littérature, un lézard stylisé aborigène en peinture, la dame de Brassempouy en sculpture.
- l'œuvre représente exactement avec le modèle original ou veut le faire : c'est l'art classique. Un roman naturaliste, un portrait de maître hollandais, un buste grec ou romain.
- l'œuvre dépasse et sublime le modèle original : c'est l'art romantique. C'est un peu subtil mais le romantique c'est tout ce qui dépasse l'art classique en ajoutant une vision qui n'existe pas dans le modèle original. La victoire de samothrace par exemple, qui ajoute des ailes à un corps humain pour personnifier une allégorie, ou une nouvelle fantastique de Poe.
Si tant est que le sujet d'origine provienne de la nature, une œuvre d'art appartiendra toujours à l'une de ces trois catégories. Soit elle ne le décris pas complétement, soit elle le décrit parfaitement, soit elle le décrit plus qu'il n'est.
Dans le cas de l'ananas on se trouve précisément dans le cadre de l'art classique, une représentation parfaitement exacte du sujet (puisque le sujet EST l'œuvre). Ce qui est en soi est totalement transgressif dans une exposition contemporaine où tout est déconstruit et rien n'est représenté pour ce qu'il est. Et comme l'art contemporain valorise la transgression, l'ananas devient une œuvre d'art contemporain qui oblige cet art à se confronter à lui même et à sa propre vacuité en transgressant ses propres lois de transgression ! Ouff... Voilà :-)
Maintenant je vais postuler à la FIAC, ça doit être amusant de rédiger les notices pour expliquer au spectateur ce qu'il est censé comprendre dans une œuvre qu'il est trop con pour comprendre tout seul. Quelques sophismes noyés dans un lyrisme postmoderne déconstructif et le tour est joué, à moi les billets !!
Voilà oui j'aurais sous-titré l'ananas "Transgresser la Transgression" et le tour est joué, une œuvre d'art à coter plusieurs millions.
Oui, mais qu'est-ce qu'on constate, quand on observe l'objet en détails ? C'est que la partie sporadique ne présente pas de prospérités et que DONC, elle est lisse.
Tu confonds quelques concepts.
Pour Hegel, l'art est toute idée qui devient matière. L'idée, la conscience de l'Homme en somme, s'objective (devient objet) dans la production artistique. En ce sens, une coupe de cheveux ou un tatouage (là c'est Hegel qui le dit lui-même) sont de l'art. Même le choix des tes vêtements le matin est un geste artistique.
Par contre, le geste artistique qui est apprécié "de toutes les nations et de toutes les époques" et qui réussit à s'extirper de sa singularité culturelle (en tant qu'il n'est plus seulement le produit d'UN homme, d'UNE culture et d'UNE époque) devient lui un chef d’œuvre.
Merci pour la précision !
La distinction entre art et culture est effectivement personnelle (la lecture d'Hegel remonte à quelque temps déjà)… pour moi l'art s'applique aux chefs d'œuvre, tandis que la culture est vouée à disparaitre ou à devenir un folklore distrayant.
Ce que Hegel appelle "geste artistique" je le nommerai plutôt "geste culturel", ne devenant artistique qu'à partir d'un certain point de perfection. Mais c'est juste une question de sémantique, dans l'absolu.
Mais ça consiste en quoi en fait de lui "arracher sa valeur d'usage originelle", faut l'éplucher par où l'ananas ? Qu'est-ce qui fait que si je dépose ma chaussette dans un musée c'est soit toujours une chaussette soit une œuvre d'art ?
C'est pour ça qu'on voit dans tout les magasins du genre but , conforama des objets de décoration en ananas depuis un an ?
Oui bon il a juste posé un ananas sur un présentoir...
Ben quitte à manier les concepts d'un auteur, autant les nommer comme cet auteur le fait, par honnêteté intellectuelle.
Sa valeur d'usage c'est d'être mangé, voire cuisiné et mangé. Donc en le posant sur un présentoir tu vois forcément l'ananas comme tu ne l'as jamais regardé, tu lui as ôté sa valeur d'usage ordinaire et tu offres à celui qui le regardes une nouvelle façon de le voir, de l'envisager.
Mais ce n'est pas nouveau, d'autres l'ont fait avant lui. Car la créativité ne vient pas de l'objet en lui-même mais seulement dans le fait d'exposer un objet du quotidien. Il n'a donc plus ici d'acte artistique. mais cela ne m'empêche pas de trouver l'idée génial (je me demande même si la galerie n'est pas complice, pour faire de la pub à l'expo).
Après je sais pas si je serai vraiment fan d’une exposition faite d’objet du quotidien simplement posés sur un présentoir.
J’aurais trop l’impression d’être à IKEA ou au supermarché.
Pour moi il fait un minimum de transformation.
Oui enfin non justement, Marcel Duchamp a justement voulu dénoncé la branlette intellectuelle en admettant vouloir se moquer de certains musées "select" avec son urinoir.
Le vrai problème ce sont les spectateurs qui prêtent des intentions aux artistes alors qu'ils ne les ont jamais eu, elle est la la dénonciation et la beauté, à la limite.
L'avantage c'est que tu peux visiter une exposition d'art permanente juste en rentrant chez toi.
Dans les années 1910, exposer un objet du quotidien c'était révolutionnaire, créatif, là tu transformais vraiment le regard des gens. Aujourd'hui c'est risible et sans intérêt.
C'est comme le premier homme qui a comparé la femme dont il était amoureux à une rose. C'était un génie. Tous les suivants sont des idiots et des ringards.
Là je crois que c'est toi qui prête des intentions à Duchamp. Ce n'est pas si simple, si on s'intéresse à l'histoire de "Fontaine".
En 1912 Duchamp se fait refuser, à Paris, un tableau par une société d'artistes. Le tableau ne sera pas exposé. Il garde cette déconvenue en tête. (Tableau qui est aujourd'hui au Museum of Art de Philadelphie).
En 1916, il fonde une société d'artistes à New York, très ouverte et très libre sur le principe: on expose tout le monde, y'a pas de jury, du moment qu'on paie un droit d'entrée. Et c'est certainement pour tester l'ouverture d'esprit de ses amis et associés qu'il a envoyé anonymement l'urinoir intitulé "Fontaine" à sa propre société d'artistes. Et il a été refusé par un vote à la majorité, ce qui a entraîné la démission de Duchamp de cette société (sans avouer qu'il était l'auteur de "Fontaine"). Et un autre sociétaire démissione également, Arensberg. C'est de lui que vient l'expression "libéré de sa valeur d'usage" que j'ai utilisé.